Le secteur minier congolais, pilier de l’économie nationale, a été le théâtre d’une session d’échange historique et musclée le jeudi 18 septembre 2025. Réunissant le Ministre National des Mines, Louis Watum, et les PDG des principales entreprises au Centre d’excellence de Kamoa Copper SA, cette rencontre « marathon » de cinq heures a levé le voile sur les menaces structurelles qui pèsent sur l’industrie.
Loin d’un exercice de façade, le dialogue s’est concentré sur les trois points névralgiques du secteur : la stabilité du Code minier face aux lois des finances successives, l’envahissement des sites par l’artisanat illégal et l’amélioration du climat des affaires.
Le « Marathon » des Doléances
Les CEO, s’exprimant sans concession, ont dressé un bilan alarmant. Les représentants de la Chambre des Mines et de la FEC ont dénoncé l’instabilité réglementaire, insistant sur la nécessité d’un partenariat tripartite (État, entreprises, communautés) pour stopper les « règles du jeu qui changent constamment ».
En huis clos, les chiffres ont parlé :
- Harcèlement Administratif : Les entreprises ont fait état de plus de 52 missions de contrôle depuis le début de l’année 2025, un chiffre en constante augmentation qui révèle un manque criant de coordination et d’efficacité. Ce fardeau administratif est perçu comme une « instabilité fiscale qui vide la quintessence du Code minier ».
- Insécurité et Pertes Colossales : Le problème le plus critique est l’envahissement des concessions. Qualifiés de « milices bien organisées », ces exploitants illégaux sont parfois soupçonnés d’être protégés par des autorités locales, et auraient coûté à une seule entreprise plus de 3 milliards de dollars de pertes en spoliation de gisements riches.
- Crédits TVA et Énergie : S’ajoutent à cela des freins structurels majeurs, notamment l’énorme dette de l’État en crédits de TVA envers le secteur, estimée à plus de 2 milliards de dollars, et le déficit énergétique chronique qui entrave les projets d’expansion.
La Réponse du Ministre : Une Promesse de « Bonne Gouvernance »
Ancien opérateur minier lui-même, Louis Watum a affiché une empathie et une détermination peu communes. Il s’est positionné comme « l’avocat » des miniers, reconnaissant les frustrations et s’engageant à les porter au sommet de l’État.
- Lutte Anti-Corruption : Le Ministre a fermement promis de s’attaquer à la corruption, ce « cancer », reconnaissant ouvertement l’implication d’autorités militaires et provinciales dans l’entretien de l’insécurité sur les sites. Son engagement à se rendre dès le lendemain sur le site de TFM illustre sa volonté de passer immédiatement à la vérification de terrain.
- Cobalt et Stabilité : Concernant la suspension de l’exportation du cobalt, une mesure qui impacte lourdement des entreprises comme KISANFU MINING, le Ministre a annoncé sa levée imminente, mais a prévenu qu’elle serait assortie de nouvelles exigences pour garantir un « franc jeu » et un « prix mutuellement bénéfique ».
- Feuille de Route Sociale et Patriotique : M. Watum a articulé sa vision autour de la bonne gouvernance, insistant sur :
- La redistribution de la richesse minière en faveur des populations locales.
- L’éradication des antivaleurs
- Une stratégie de reconversion à long terme pour les quelque trois millions d’artisans miniers.
La session s’est conclue par l’engagement de transformer les doléances en actions concrètes. La mise en place d’un comité de suivi et de réunions périodiques officialise le tournant vers un dialogue public-privé plus structuré et efficace.
En se rendant à TFM pour inspecter le site et visiter la nouvelle usine 30K, le Ministre a symboliquement scellé le passage des discussions à la réalité du terrain. Cette journée historique a érigé le pragmatisme et l’intégrité en fondations du nouvel élan pour un secteur minier congolais plus juste et plus prospère. Reste à voir si les engagements pris se concrétiseront en actes face à l’inertie administrative et aux résistances locales.





